vendredi 4 mai 2007

Ode au vieux Bukowski

"Gun" by Tibarama



M
on pote, le bon vieux Buck était spécialiste en enfonçage de portes ouvertes. Tel fut son art, assumé, avec plus ou moins de verve mais toujours prêt, histoire de voir si la porte ouverte résistait. L’enfonçage de porte ouverte est un art en effet, pour la simple raison que la moindre résistance de celle-ci, elle peut d’ailleurs être entrouverte, est une raison supplémentaire de s’y frotter en bon pervers, de haut en bas, de droite à gauche, d’avant en arrière. Elle peut-être fermée… Aucune raison alors d’y laisser une épaule ou autre chose.

« Se lamenter sur un cadavre est aussi inconséquent que de verser des larmes sur une fleur qu’on vient de couper. L’horreur, ce n’est pas la mort, mais la vie que mènent les gens avant de rendre leur dernier soupir. Ils n’ont aucune considération pour elle et ne cessent de lui pisser, de lui chier dessus. Ils ne s’obsèdent que sur la baise, le cinoche, le fric, la famille, tout ce qui tourne autour du sexe… » *.

L’est beau le bon vieux Buck. Il pointe, il tire, il se fout des précautions, il va droit au but. Mais l’enfonçage de porte ouverte est un art. Ainsi, chier sur la vie c’est baiser comme un con (comme un con!)… La baise (on s’en serait douté, l’acte histrionique et hystérique), le cinoche (une évidence industrielle qui rend aux industries ce que les industries lui donne), l’oseille (l’essence même du cul, et du cinéma en passant, LE carburant), la famille (une vérité pornographique, un carburant idéologique plein de fesse qui permet même de se passer de la fraîche en la désirant ardemment), tout cela est pour-la-mort.

Bukowski, ou l’art bien compris d’enfoncer les portes ouvertes. Il est bon le coco. Un Fatum à lui tout seul…

« La majeure partie des morts l’était déjà de leur vivant (…). »

Qu’est-ce que tu fous Buck, tu te la joues là. Une petite « Nuit des morts vivants »? Une métaphore mignonne tout plein du Roméro qui cherche à comprendre ?

Non bien sûr, mon Buck, tu t’en branles des métaphores et du cinoche, tu l’as dit toi-même. Tu enfonces cette porte ouverte avec brio et avec l’élégance du bourrin majestueux. Tu ne chies même pas dessus, sinon par principe, mais surtout et avant tout, tu la conchies. Et cette esthétique débarrassée de plumes au cul, de pédagogies alourdies de zombies de supermarché, tu te paies le luxe de t’en passer. Mon Buck, Tu es chic, tu es « sortable », désinvolte, trivial et génial. Mon bien cher Buck, tu es pénétrant. Enfonce Buck, défonce la porte ouverte que d’aucun présente comme la fermeture absolue histoire de se réserver un livre entier (dont la trésorerie fera office de vérité insondable!) sur la question.

« La mort obsède moins, car on se sent si hébété en compagnie de ses frères bipèdes qu’on en oublie de penser ».

J’t’aime mon Buck, avec tes conneries, ton pétage de boulon et tes couilles pendues à la plume.

C’est quoi le délire, vivre jusqu’à la fin ? En lucide cynique ? En enfonceur de portes ouvertes ? Il faudra reconnaître cet art consistant à ouvrir l’ouvert et cette propension étrange à chier, au passage, dessus, ou plutôt à côté.

Bonsoir, mon très cher Buck, mort au champ d’honneur de la Vie et de ses humeurs, un gun dans le cul mais pas seulement dans le sien. Et pour la bonne cause, sans médailles.

Loo

1 commentaire:

Anonyme a dit…

en ce qui concerne les portes, y'en a quelques unes à enfoncer ici